Bas les voiles !

Chahdortt Djavann

Gallimard 2003




"Bas les voiles !" est LE pamphlet de cette rentrée littéraire 2003. L'auteure est iranienne et elle sait de quoi elle parle. Le ton est donné dès les premières lignes : "J'ai porté dix ans le voile. C'était le voile ou la mort. Je sais de quoi je parle."

Oserait-on prêter l'oreille aux sirènes de ces intellectuels français pour qui l'islam est culture et le voile un art de vivre ? Chahdortt Djavann n'est pas économe de flèches acérées envers ces faiseurs d'opinion qui sont autant de traîtres à la laïcité. Son parcours personnel est la meilleure réponse qui soit pour faire mordre la poussière à cette clique sourde et aveugle : âgée de 13 ans lors du "désastre historique de 1979", elle a été "réprimée, condamnée à être une musulmane, une soumise, et emprisonnée sous le noir du voile" jusqu'à l'âge de 23 ans.

Où sont ces intellectuels de salon complices de la barbarie islamique quand, en France, on force des fillettes à se murer dans une prison portative ? Que disent-ils quand, de fait, des enfants de 10 ans sont réduites au statut d'un objet sexuel à préserver pour la jouissance du futur mari ? Le droit à la différence, l'expression de la foi (quelle foi ? celle d'entériner l'infériorité de la femme ?), le refus de l'exclusion à l'école : voilà leurs lâches démissions, oubliant toutes celles, beaucoup plus nombreuses, qui sont contraintes à la porter. L'auteure ne dresse aucune liste de noms, elle serait trop longue. Un seul apparaît cependant : la Ligue de Droits de l'Homme et sa relecture de la laïcité qui, selon elle, n'interdirait pas d'afficher son esclavagisme religieux à l'école.

Mais Chahdortt Djavann va plus loin, mue par un courage sans faille et une rage saine. Le voile, imposé aux enfants, opère une véritable perturbation psychologique autant intime que déstructurante. Il faut donc l'interdire pour les filles. Non pas en invoquant la laïcité mais, plus simplement, par respect des droits humains, une valeur universelle quoiqu'en disent les islamistes.

Comme le panorama ne serait pas complet sans évoquer les midinettes fanatiques de leurs voiles, l'auteure les exécute sur place : "Elles sont adultes. Elles peuvent même enfouir leur corps dans une couverture en laine par une chaleur de trente-cinq degrés. Si ça les fait jouir, c'est leur affaire." Qu'elles aillent, non pas au diable, mais en Afghanistan ! Le port du voile y est si doux... Et puis, si les hommes "adorent tant le voile, ils n'ont qu'à le porter eux-mêmes."

Lu avec la rapidité de l'éclair, cet ouvrage captivant est un cri de révolte comme seules les victimes peuvent le faire. Mais c'est aussi un appel à un ressaisissement pour une France qui n'a pas seulement oublié mais aussi renié sa laïcité, embrumée dans sa mauvaise conscience et le confort issu du succès des luttes passées. L'écriture est passionnée et la lecture ne l'est pas moins. Une charge qui n'a que faire des politesses diplomatiques : à bas le voile !


14 septembre 2003


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